Fiche technique
Nom original | Kanashimi no Belladonna (哀しみのベラドンナ) |
Origine | Japon |
Année de production | 1973 |
Production | Mushi Productions |
Durée | 89 minutes |
Auteur roman | Jules Michelet |
Réalisation | Eiichi Yamamoto |
Production | Tadayoshi Watanabe |
Scénarii | Eiichi Yamamoto, Yoshiyuki Fukuda |
Animation | Tsuneo Maeda, Shin'Ichi Tsuji, Chikao Katsui, Hayao Nobe, Toshiyasu Okada, Osamu Dezaki, Tadakatsu Yoshida, Yoshiyuki Hane, Kiyomu Fukuda, Hiroyoshi Mitsunobu, Reiko Okuyama, Shirô Murata, Shûichi Seki, Seiichi Hayashi, Kamakiri Uno |
Planning | Eiichi Yamamoto |
Direction de l'animation | Gisaburô Sugii |
Direction artistique | Funi Fukai |
Décors | Takao Kodama, Fumiharu Shitamichi, Mihoko Magôri, Junko Sasaki (2), Yoshishige Kosako, Miho Chikai |
Montage | Masashi Furukawa |
Musiques | Masahiko Satô |
Diffusions
Arrivée en France (cinéma) | 29 avril 1975 / 15 juin 2016 |
1ère diffusion hertzienne | 13 octobre 2013 (Arte)
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Rediffusions | 24 octobre 2013 (Arte)
4, 13, 15 et 21 mai 2017 (Ciné + Club) |
Synopsis
Jean et Jeanne sont amoureux et souhaitent se marier. Mais pour que leur union soit célébrée, ils doivent s’acquitter d’une lourde taxe qu’ils ne peuvent payer auprès du seigneur féodal. Ce dernier chasse alors Jean du château et exerce son "droit de cuissage" sur Jeanne. Répudiée par son compagnon, la jeune femme reçoit la visite d’un esprit de forme phallique qui déclare pouvoir l’aider.
Alors que la famine, la guerre et la maladie font rage dans le pays, Jeanne résiste jusqu’à devenir une prêteuse sur gages crainte et respectée. Voyant son autorité défiée, la Baronne la fait chasser en excitant la foule et en invoquant chez Jeanne la possession par le Diable. Recluse dans une grotte, la jeune infortunée fait de nouveau face à l’esprit, désormais gigantesque, et accepte de se donner à lui corps et âme pour obtenir la puissance qui lui permettra de se venger de tous ceux qui l’ont fait souffrir.
Mais qui du Diable ou du seigneur Baron aura finalement raison d’elle ?
Commentaires
Attristé par l’imagerie enfantine à laquelle l’animation est d’ordinaire associée, Osamu Tezuka au moment de fonder son studio Mushi Production songeait à produire des séries pour le grand public dans le but de pouvoir financer des longs-métrages destiné aux adultes. C’est ainsi que lui et son collègue Eiichi Yamamoto lancèrent en 1969 le projet Animerama (contraction d’anime et de drama) : des films ambitieux sur le plan plastique et abordant des thèmes alors peu explorés en animation, dont l’érotisme en particulier. Le premier, Les Mille et une nuits, n’eut droit qu’à un succès limité au Japon. Le second, Cleopatra, réalisé en 1970 n’aura même pas cette chance ; achevé dans la précipitation, le film mettra le studio au bord de la ruine. C’est dans ce triste contexte que Yamamoto décide de lancer le troisième et dernier volet de la série : une adaptation libre de La Sorcière de Jules Michelet. Peu intéressé par le sujet et ne se faisant aucune illusion quant au sort de Mushi Production, Tezuka accorde le feu vert à son collègue qui s’attèlera au projet sans l’implication du maître. L‘équipe acceptera de mener le film jusqu’au bout pour que l’histoire du studio s’achève sur une belle note.
Délaissant le graphisme rond de Tezuka utilisé dans les deux précédents Animerama, La Belladonne de la tristesse repose sur une esthétique Art Nouveau citant ouvertement des œuvres d’artistes comme Alfons Mucha, Aubrey Beardsley, Gustav Klimt ou Egon Schiele. Les difficultés économiques du studio ont en effet poussé les animateurs à délaisser le mouvement au profit de l’expressivité graphique et du caractère iconique des formes. Le découpage du film repose donc pour l’essentiel sur des dessins fixes ou peu animés et suscite l’émotion par l’aspect pictural de ses plans en jouant sur la force d’évocation du trait et des textures. À ce titre, la mise en scène de La Belladonne se rapproche énormément de celle de Très Cher Frère, autre œuvre sulfureuse de l’animation japonaise ; il est même probable que le réalisateur de la série Osamu Dezaki y ait apporté une bonne partie de son travail en tant qu’animateur sur le film de Yamamoto.
Alors que Les Mille et une nuits et Cleopatra donnaient du sexe une image hédoniste mâtinée d’humour, La Belladonne de la tristesse avec son récit tragique, son graphisme anguleux et rêche, restitue la sexualité dans tout ce qu’elle peut avoir de destructeur et de subversif. Dénonçant la violence faite aux femmes, célébrant l’exaltation des sens comme signe d’insurrection à travers son graphisme bigarré et ses effets psychédéliques, le film demeure à ce jour une référence du dessin animé d’avant-garde. Malheureusement, ses qualités et sa nomination à l’Ours d’Or du festival de Berlin de 1973 ne l’empêcheront pas d’être un échec commercial. Et si Mushi Production ferma ses portes quelques jours avant la sortie en salles, Tezuka fondera en 1977 un nouveau studio avec une nouvelle équipe sous ce même nom.
Les salles françaises le diffuseront deux ans plus tard sous le titre Belladonna, la Sorcière, devenant ainsi l’un des premiers long-métrages d’animation japonais diffusées dans l’Hexagone aux côtés du Chat Botté de Kimio Yabuki et du Serpent Blanc de Taiji Yabushita.
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